À la découverte du métier de soigneur dans un parc animalier

Entre passion, rêve et réalité

C'est un métier qui met des étoiles dans les yeux des enfants. Au plus proche des animaux, les soigneurs sont les gardiens du bien-être de leurs protégés. Loin du rêve de « simplement » caresser les animaux, les soigneurs s'occupent surtout de nettoyer leurs enclos, de leur donner à manger, de les stimuler et de les entraîner.

Pour découvrir l'envers du décor et la réalité du métier, Paris Match Belgique est allé à la rencontre de trois soigneuses du parc zoologique élu le meilleur d'Europe : Pairi Daiza.

Pairi Daiza n'a pas encore ouvert ses portes, que les résidents du Resort admirent déjà les ours polaires.

Il est 9h et Virginia nourrit ces grands mammifères. Les visiteurs s'approchent autour des barrières, visiblement sous le charme de ces imposants carnivores.

Poissons frais au menu pour les deux mâles et les deux femelles du parc. Si les mâles se jettent sans problème dans l'eau, les femelles sont quant à elles plus frileuses. « C'est pour ça que j'en jette aussi sur la terre, pour qu'elles puissent en manger maintenant. Ceux qui sont dans l'eau, elles les mangeront quand elles seront mieux réveillées. »

Virginia a toujours travaillé avec les animaux. Après être passée par la SPA, un centre de réhabilitation d'animaux sauvages, puis d'autres parcs animaliers, la soigneuse est présente depuis presque deux ans à Pairi Daiza. Elle s'occupe des animaux carnivores du parc, ce qui englobe les ours polaires, les tigres, les lions, les panthères, les hyènes, les loups...

Si elle travaille depuis plusieurs années avec des carnivores, cela n'a pas toujours été le cas. À ses débuts, elle travaillait avec les primates. « On apprend beaucoup avec la pratique et grâce aux autres soigneurs qui ont plus d'expérience... Tous les parcs n'ont pas des ours polaires, donc avant qu'ils arrivent à Pairi Daiza, j'ai contacté des soigneurs d'autres parcs qui avaient l'habitude de s'occuper des ours polaires. Même si on ne se connait pas, il y a beaucoup d'entraide. »

Après avoir nourri une première fois les quatre ours polaires, Virginia les fait rentrer dans leur enclos appelé « backstage ». Une fois les portes bien fermées, elle peut aller sur leur territoire extérieur pour cacher de la nourriture et nettoyer aussi leurs excréments.

« Il faut une grande concentration pour travailler avec eux. Ce sont des animaux sauvages dangereux, donc la sécurité est essentielle. Il y a deux trappes qui nous séparent quand je vais sur leur territoire. Et ça peut paraître bête, mais par exemple, je prends les clés des trappes avec moi pour être sûre que mes collègues n'ouvrent pas par accident. J'étais très stressée au début, mais maintenant, j'ai un peu plus l'habitude – bien que je sois toujours vigilante. »

Un peu de salade sous un caillou, des cacahuètes dans un jeu, des pommes dans un coin, un bloc de glace renfermant des sardines congelées...

L’enrichissement est une activité essentielle pour le bien-être des animaux en captivité. Sachant qu'ils n'ont pas à chasser leur nourriture, à défendre leur territoire, ou à se protéger face à des prédateurs, ces enrichissements vont augmenter les possibilités pour l’animal d’exprimer des comportements naturels. Cela permet de stimuler leurs sens (l'odorat principalement), mais aussi leur réflexion et leur dextérité en interagissant avec ces jouets où sont cachés de la nourriture.

« On change tous les jours les aliments et les horaires pour ne pas créer un comportement stéréotypé des animaux. On échange les enclos des mâles et des femelles. On invente aussi de nouveaux jouets pour les stimuler. Par exemple on cache des crustacés dans des tubes en toiles de jute de lances à incendie. On essaye vraiment que chaque jour soit le plus différent possible. »

Si le quotidien des animaux devient trop régulier et qu'ils ne sont pas assez stimulés, ils adopteront alors un comportement stéréotypé. Concrètement, les animaux auront une attitude très répétitive, déambulant inlassablement la même trajectoire, pour compenser un stress important. Ces séances d'enrichissement sont donc nécessaires au bien-être des animaux.

Si sa collègue Louise adore inventer de nouveaux enrichissements pour leurs protégés, Virginia aime particulièrement observer le comportement des animaux.

« Quand on effectue leur entraînement médical, c'est très gratifiant quand ils écoutent et coopèrent. Ces entrainements habituent l'animal à être touché pour qu'une intervention médicale, comme une piqûre ou une prise de sang, se fasse sans stress pour lui. »

Ces entraînements médicaux sont effectués par les soigneurs, toujours basés sur la coopération de l'animal. Avec des cibles et un système de récompense, les animaux apprennent à ouvrir la bouche par exemple (pour les soins dentaires), ou à présenter leur patte (pour une prise de sang). Cet apprentissage permet d'éviter pour certains soins une anesthésie.

Virginia aime son métier, et elle aime le partager. « C'est une vraie passion d'être au contact des animaux carnivores. On peut passer un vrai message, ce sont les ambassadeurs de leur espèce en quelque sorte, qui sont en condition critique dans la nature à cause du réchauffement climatique. C'est très gratifiant quand on voit des enfants lire les pancartes explicatives et retenir des informations sur les animaux. Ils n'admirent pas seulement leur beauté. »

Il est 10h. Le parc ouvre ses portes au reste des visiteurs. Si les enfants courent voir les pandas géants, les tigres de Sibérie ou encore les manchots du Cap, il existe pourtant plus de 800 espèces différentes à Pairi Daiza.

Et être soigneur permet justement de découvrir de nouveaux animaux et de nouvelles espèces. C'est notamment le cas de Madison qui s'occupe des petits mammifères.

Si à l'origine elle souhaitait travailler avec les primates, elle a finalement changé d'avis. « C'est trop d'émotions, ils sont trop proches de l'humain... Les grands primates sont trop intelligents. »

Madison s'occupe donc des suricates, des paresseux, et d'autres petits carnivores et rongeurs. « On a un contact direct avec eux, on est plus proches. C'était un hasard, mais j'ai eu un véritable coup de cœur pour les marsupiaux. »

Visiter un parc zoologique, c'est aussi l'occasion de découvrir de nouvelles espèces, comme les Couscous des Célèbes, une espèce endémique d'Indonésie.

Ces petits marsupiaux grandissent comme les kangourous dans la poche de leur maman. Ils ont une longue queue dépourvue de poils dont ils se servent comme d'un cinquième membre, pour se pendre notamment et éviter de tomber.

Dans leur milieu naturel, ils sont menacés par la déforestation, la chasse et le commerce illégal d’animaux exotiques. Du fait qu'ils ne soient pas nombreux dans la nature, les Couscous des Célèbes sont encore très mal connus.

« J'ai eu un véritable coup de cœur pour eux. On a réussi à avoir un vrai lien. »

Madison prépare la petite assiette de nourriture pour Palu (le mâle) et Teku (la femelle). Elle la dépose en hauteur pour éviter que les petits kanchils de Java au sol ne se servent.

« J'aime beaucoup les observer. Ils ont une façon bien spécifique de dialoguer, de se comporter... On a encore peu d'informations sur eux. J'en apprends tous les jours, j'étudie la manière dont ils évoluent... Leur comportement n'était pas du tout le même quand le mâle était seul, et quand ils sont à deux. »

« On ne peut pas les cerner, c'est ça qui est attachant. »

Au plus proche des Couscous, Madison les observe attentivement afin d'avertir le vétérinaire en cas de besoin.

La journée continue. Les soigneurs enchainent les nettoyages et les nourrissages des 7 000 animaux du parc. Ils organisent des enrichissements et des entrainements médicaux avec les différents pensionnaires. Ils aménagent également les enclos de leurs protégés.

La fin de journée approche, et bien que les journées soient un peu plus agréables en ce mois d'avril, les nuits restent fraiches pour certains animaux.

Munie d'une branche de saule pour capter leur attention, Doriane appelle les girafes pour les rentrer dans leur enclos intérieur. Juul, la femelle, prend rapidement le chemin du bateau, suivie de près par la petite Zuri née le 9 mars dernier.

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Une fois à l'intérieur, les girafes ont le droit à un bon repas... enfin surtout Juul, car Zuri est encore allaitée. Doriane est dans son élément. « Ce n'est pas un travail, c'est vraiment une passion. » La soigneuse s'occupe des grands mammifères, ce qui englobe pas moins de 9 espèces différentes dans son secteur. « On travaille avec différents animaux, alors on apprend toujours plus. Naturellement, on se pousse à toujours plus étudier pour répondre à leurs besoins. »

« C'est super important de construire cette relation de confiance. »

Après les girafes, c'est au tour des hippopotames nains de rentrer. Et ne vous fiez pas à leur nom : s'ils sont plus petits que les hippopotames communs, ils pèsent tout de même entre 180 et 270 kg.

Le métier de soigneur n'est pas de tout repos. Que ce soit avec des petits animaux ou des grands mammifères, être soigneur demande également beaucoup d'efforts. « C'est un métier très physique. Tous les jours on transporte beaucoup de nourriture, on nettoie tous les enclos. »

Alors que Doriane se confie, la femelle ouvre grand sa gueule pour la montrer à sa soigneuse. Une ouverture à 150 degrés tout de même.

Et si le métier peut parfois être difficile, le négatif est vite oublié. « J'aime tous les moments avec eux. De la voir là, jouer avec sa boule, la mettre dans l'eau... Ça commence dès le matin avec le premier bonjour. Même le nettoyage, j'aime ça ! »

En regardant Doriane, on voit tout de suite la passion qui l'anime. Que ce soit pour rentrer les animaux dans leurs enclos, ou pour leur donner à manger, la soigneuse est toujours positive et le fait avec un grand sourire.

« Les voir en bonne santé, c'est un bonheur. »